Index >>
Liste des pays >>
Carnet de bord: la Libye >>
Version à imprimer >>
Intégrale des musiques de Libye (92 Mo) >>
Pays suivant: l'Egypte ...
Carnet de route
Libye
"Tiens, il y a des gens qui viennent vers nous...
- Ils n'ont pas l'air content, ils ont des bâtons.
- Euh, des fusils, pas des bâtons"
Il était si joli, ce petit lac de sel juste derrière la frontière
Libyenne. Comment aurions-nous pu deviner que
signifie
"Zone Militaire / Accès Interdit" ? Finauds, nous
comprenons tous les trois au moment où l'un des cinq
militaires arme sa kalachnikov. Les deux heures passées
à vérifier nos passeports nous permettent d'admirer le reflet
du soleil couchant sur la croûte de sel "jamillah, jamillah
jidam" et de tester nos 15 mots d'arabe "nahnou daraja
safar" ("nous vélo voyage").
En fait, ils sont plutôt sympas, les militaires Libyens.
Le premier douanier nous tend un formulaire cabalistique
intégralement en arabe, à remplir dans la minute. Fou rire
nerveux. Il ne bronche pas. Ses collègues sont beaucoup
plus intéressés par les phrases écrites en arabe sur le
pupitre des vélos "pour apprendre en pédalant" que par nos
passeports, recopiés à l'envers.
Jusqu'à Tripoli, ce sont d'ailleurs surtout des militaires
souriants que nous rencontrons : toujours prêts à nous offrir
de l'eau, nous faire visiter, hilares, les sordides cachots
des prisons ou nous indiquer le chemin de la plage...
Isabelle : Bon, c'est pas tout ça, mais j'ai queq'chose d'important
à vous dire et je ne sais pas comment.
Alice : Aïe, elle va le
dire, c'est sûr elle devrait pas, elle devrait pas, elle
devrait pas.
Isabelle : Il s'agit de Xavier et moi...
Alice : Paf, elle va tout
dire, c'est trop horrible !
Isabelle : En fait, voilà...
Alice : ...elle
devrait pas, elle devrait pas, elle devrait pas
Isabelle : Bon, elle va me
laisser parler, maintenant ?
Alice : ho, si c'est ça, débrouille-toi, après tout c'est votre
problème
Isabelle : ça y-est, elle boude, de toutes les façons elle boude
depuis le début, j'en ai marre de cette famille. Bref, entre
Xavier et moi, l'ambiance s'épaissit depuis plusieurs semaines,
à tel point que, chacun de notre côté, nous n'avons pas
l'impression d'entrer dans le voyage. Nous en avons discuté :
le plus malin serait de gambader séparément et se retrouver aux
étapes.
Alice : ça y est, t'es fière de toi maintenant, tout le monde sait. Moi j'aurais parlé de la nuit passée dans les ruines de Sabratha, des mosaïques du IIe siècle au bord de la mer, des dunes qui
changent de coul...
Isabelle : Oui ben toi tu vas reprendre ton avion fissa fissa pour Paris et
acheter tes cadeaux de Noël sous la pluie, on n'en parlera plus.
Elle m'énerve, elle m'énerve, trois semaines que j'essaye de la
semer dans les dunes...
Ghât, fin octobre début novembre
Que c'est loin, Ghât, et
qu'il fait chaud dans le Sahara... Il faut avouer que nous avons
légèrement triché. Bon, nous n'avons pas quitté nos bicyclettes,
nous avons bien traversé le Sahara jusqu'à la frontière algérienne,
mais à 120 km /h à l'arrière de plusieurs pick-up. L'un d'eux nous a
laissés au beau milieu de rien pour rejoindre un puits de pétrole situé
à l'écart de la route. Après le vacarme du vent dans les oreilles,
grisante intensité du silence et du paysage. Une immense étendue plate
où la roche affleure sous le sable et, tout au bout de l'horizon, la
douce silhouette des dunes. C'est bien pour ces dunes, si attirantes,
que nous avons désiré ce détour saharien de 2400 km (tout de même...).
Rami Mébarki, touareg algérien rencontré à Paris, nous avait fait rêver
de ces oasis et des
musiques nomades (Fichier = Leggy.mp3 ; taille = 1409 ko).
Maintenant nous y sommes, et nous percevons d'ici
les voix de ces femmes
(Fichier = libye-leggy-wonderwomen.mp3; Taille = 1252 ko).
Le Tassili
algérien est là, tout près. Et tout autour de notre campement, des dunes aux
couleurs toujours changeantes.
Les quelque touristes qui viennent jusqu'ici s'engouffrent dans des 4x4
pour traverser le massif de l'Akakous, et admirer des gravures rupestres
préhistoriques étonnamment stylisées.
Nous, nous avons le temps pour tout
le reste -et l'argent pour rien. C'est sans doute pour cela que Mohammed,
Hassan, Magaji et les autres se décarcassent pour nous inviter
à tous les mariages
(Fichier = libye-mariage1.mp3; Taille = 741 ko) et nous présenter aux musiciens.
Quoi de plus agréable qu'être au
bout du monde et s'entendre appelé par son prénom où que l'on soit...
Grâce à tout le matériel que nous trimbalons, nous pouvons dupliquer les
enregistrements pour les offrir, montrer les images filmées et expliquer
le fonctionnement d'internet, (le site est installé sur l'ordinateur, même
sans connexion). Alors ça défile.
La vieille Deva et son rebab
(Fichier = libye-deva-rebab.mp3 ; Taille = 689 ko), Twati et
Achur à
l'accordéon
(Fichier = libye-twati-accordeon-percus.mp3 ; Taille = 178 ko), Tahar Leggy et son ud Syrien,
Abdullaziz au ney (flûte
de roseau; Fichier = libye-ghat-abdul.mp3; Taille = 150 ko), les filles de Fewet et leur sambali (photo),
toutes nos journées sont occupées à capturer
ces sons d'oasis.
Et les nuits, si vous saviez... Twati nous a prêté
deux robes scintillantes à la mode de Ghât, et avec Alice,
on fait sensation aux mariages, du côté
des femmes : démonstration de danses du ventre, qui les fait se tordre
de rire, on ne sait toujours pas pourquoi. Pourtant on ne manque pas de grâce,
hein Alice ?
Tais-toi et ondule, la mariée regarde...
Voilà pour notre quotidien. Il
faut imaginer des dunes hautes comme des montagnes, des myriades d'étoiles,
le sifflement du vent...
Avant de vous quitter, on vous livre une petite perle de Magaji, un de nos
amis adorable et un peu (très) bavard :
"La 404 Pigeot et la Land-Rover kif-kif. Toutes les deux, elles peuvent aller
dans les dunes. Seulement la Land-Rover, elle sort toute seule du sable. La
Pigeot, il faut la pousser."
Nuit dans les ruines d'Apollonia, fin novembre
Après moult palabres en arabe et en langage des signes, le gardien et la police
acceptent de nous laisser dormir sur le site. Entre les gradins
érodés de l'Odéon et la Basilique Orientale,
les jeux de
lune sur les colonnes de marbre emportent notre décision.
Tels Socrate et Platon nous devisons tard dans la nuit sur
les dauphins des mosaïques en
bâffrant des gâteaux. Et en bonnes Socrate nous manquons de terminer
en prison : l'ombre gesticulante d'un Libyen peu amène nous
signifie qu'on nous accorde le pavillon d'entrée, pas la cité
hellène. Et "si nous pas comprendre, lui police, nous clic clic".
Soit "nahnou laa afham, clic clic" en arabe dans le texte.
Clic clic, non merci. Ce sera donc les ressacs
d'une mer argentée.
Plus d'un mois ne nous a pas suffi pour fixer notre jugement :
l'aimons-nous, à la fin, cette République Socialiste
Populaire Arabe de la Grande Jamahirya Libyenne ? Sur l'autoroute,
une voiture s'arrête, le conducteur nous tend ses sandwiches et
deux sodas (ceux que l'on n'achète jamais parce qu'ils sont "trop
chers"), il part en nous souhaitant un bon voyage. Touchées et
encore interloquées, nous le sommes ; si ce n'est que 4
voitures ont déjà ralenti pour exprimer grassement leur
appréciation de nos formes. Claquements de langue, sifflements...
ILS NOUS HORRIPILENT !
Oui mais.. nos victuailles pourrissent dans nos sacoches. Pas un soir
sans que nous soyons invitées à partager un couscous ou une
soupe à l'orge. Même lorsque nous dormons à la belle
étoile il y a toujours une famille qui nous apporte soudainement
une portion du repas. Cette fameuse nuit nous avons vu débarquer
quatre gentils couillons qui voulaient bien partager nos sacs de couchage,
en somme coucher chouia chouia avec nous. Ils insistaient calmement à
grands renforts de "Please" déchirants. Nos cris de putois, mais surtout
un bâtonnet hardiment brandi par Alice les convainc de rentrer chez leurs
parents sur un "OK, sleep, no shout...". Ils nous ont bien fait rire,
mais nous préférons quand même dormir chez des
fermiers qui nous l'avaient proposé. Et là, à minuit,
les 8 soeurs nous gavent de petits gâteaux pendant que les deux frères
mettent nos vélos à l'abri.
...
Déjà une bonne heure que nous écrivons cette
missive. Les biscuits puis le pain ont fondu plus vite que notre bougie.
Demain Alice arrêtera un pick up pour arriver à temps et attraper
son avion. Pour Isabelle, Le Caire, c'est à 10 jours de vélo.
27 novembre: douane libyenne
Xavier est arrivé, sans se presser, tranquille, heureux.
La route est coupée par une porte
géante. Visas tamponnés, l'Egypte est juste
derrière. Nous multiplions les "Libya, quoïss"
(Libye, super) à un jeune policier souriant... quand
des éclats de voix retiennent notre attention. Un flic
bedonnant pris de tension disperse une dizaine d'adultes qui
attendent devant le guichet. L'un d'eux traîne un peu et
se prend un coup de pied dans le ventre. Il tombe. Le fouet
claque sur son visage. Trois fois, quatre fois. Puis le gros
moustachu retourne derrière son guichet. Abasourdis,
nous regardons notre jeune policier en essayant de comprendre.
Lui n'a pas perdu son sourire. " Ma fish muskula" (pas de
problème), annonce-t-il, dédaigneux. "Ma fish muskula"
répète le gros en nous faisant signe de partir. Nous
fouillons la trousse à pharmacie pour sortir le désinfectant.
Par terre, l'homme est évanoui. En voyant Xav' lui relever la
tête, le gros revient avec une bouteille d'eau qu'il lui balance
sur le visage. L'homme hoquette, ouvre des yeux exorbités
et s'accroche à la djellabah d'un de ses amis venu le rejoindre.
L'ami en question le hisse sur son épaule pour l'amener plus loin.
Visiblement, il a une côte cassée. Pas moyen de faire grand
chose, mais pas possible de partir en voyant cela. Nous sommes
désemparés. Le blessé recrache nos vitamines C.
On nous lance des " Ma fish muskula " de moins en moins gentils et des
" ciao Faranciya " de plus en plus clairs. La Libye, où nous
étions si heureux de découvrir que le système de
Khadafi a beaucoup de côtés positifs, la Libye
diabolisée, pourtant si accueillante et généreuse
avec les petits cyclistes occidentaux, nous la quittons amers et
silencieux.
Le petit mot de Xav'
Comment Ca ? Vous avez encore du temps devant vous ? Profitez en
pour télécharger le petit
fichier libyexavier.rtf (30 ko)
cela vous permettra peut-être de découvrir plus à fond le pays avec
le regard de Xavier.
J'allais oublier : La carte de la Libye est téléchargeable aussi :
fichier cartelibye.tif, taille=24 ko.
eeehhhh, l'Égypte...
kilométrage dans le pays, à vélo: 1990 ----
kilométrage dans le pays en car / pick-up / avion: 2700 ----
Total du kilométrage à vélo: 6000 ----
Total du kilométrage en car / pick-up / avion: 3162.
Villes et villages traversés en LIBYE: Zuwara - Zawiya - Tripoli - Bus de nuit: Al Khums - Zlitan - Misurata - Al Qaddhiyah - SABHA - Vélo/Pick Up STop: Awabari - Sardalas - GHAT - FEWET - Retour Idem jusqu'à Tripoli, dans le sens inverse - A vélo, séparés:Tripoli - Al Khums - Zlitan - Misurata - Wadi Thamit - SYRT or SURT (X: I love that town: Ismaïl, you're such a great friend) - As Sultan - Al Uqaylah - Marsa Al Burayqa - Irq Qabi - Al Makrun - Sawani Al Qawarishahi - Ben Ghazi - Daryanah - Al Bayda (X: Nice great souvenir too; I'll come back for sure.) - Sus
Index >>
Liste des pays >>
Carnet de bord: la Libye >>
Version à imprimer >>
Intégrale des musiques de Libye (92 Mo) >>
Pays suivant: l'Egypte ...
|