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Carnet de route: Thaïlande




27 octobre 2000: Petite frayeur à la frontière : mon visa cambodgien est saturé, trempé par les inondations et illisible. Mais surtout, il est barré de six énormes Annulé depuis que je me suis fait renouveler le passeport. Donc le douanier est formel : "Il faut retourner à Phnom Penh."

Plutôt hurler. Comme le dit Xav, on a pris beaucoup d'assurance et c'est sans complexes que j'engueule le fonctionnaire consciencieux, en toute mauvaise foi.

Nous voilà en Thaïlande. Inutile de pédaler beaucoup pour voir la différence. Routes en parfait état, voitures luxueuses à deux roues motrices (j'aimerais les voir sur les pistes cambodgiennes), promesses de confort... Nous passons deux heures à laver vélos et sacoches dans une station service.

Quand j'essaye de dire merci en thai, tout le monde se marre !300 km d'autoroute jusqu'à Bangkok. J'ai perdu mes principes en Libye : c'est clair, j'y vais en stop. Je laisse donc Xav, qui a déjà 1200 km de plus que sa cousine, au compteur (on dira que c'est la Mongolie, Tchou-Tchou, tout ça). Et je m'endors dans la vanette d'un baba cool thaïlandais, avec qui la conversation n'avait même pas atteint le stade du "bonjour merci", puisque j'ai oublié de demander comment ça se dit en Thaï, à la frontière. J'espère juste que "Bangkok" ne signifie pas "on va où tu veux", sinon, je suis mal.

Bangkok, Krung Thop, la "Cité des Anges". mon bienfaiteur m'y dépose au crépuscule, sur le bas-côté de la 12 voies. Evidemment, ma lampe en profite pour tomber en panne et la mousson menace. J'apprends que les hôtels les moins chers sont à 15 km d'ici, par des boulevards dantesques et incontournables quand on n'a pas de plan.

Bangkok est une pieuvre bétonnée. La mousson la rend hostile.

A force de rouler sur des boulevards affreux et inondés, en pleine nuit, sans lampe et sans carte, j'arrive à 1h du matin. Trois heures de vélo et deux heures à poireauter sous un auvent en pensant "c'est pas possible, c'est une averse, ca va se calmer".

Bref, j'arrive trempée rue des hôtels pas chers, et on pourrait être a Londres, à Sydney ou dans plein d'endroits, sauf Paris, qui est vraiment inimitable, à tel point qu'on n'y trouve pas d'hôtels pas chers.

Un Français accepte de me garder le vélo pendant que je me désole qu'une simple coûte 160 bath alors qu'une double vaut 200 bath (40 FF).

Bref, Ludovic, le charmant Français plus fauché que moi (15 000 FF pour un tour du monde d'un an !) accepte de partager une chambre. Je pars envoyer par e-mail le numéro de téléphone de l'hôtel à mes proches.

Et là, c'est la douche froide.

Parce que parmi les nouveaux mails, l'un porte en titre : Décès Granny.

En d'autre mots, ma grand-mère maternelle vient de "partir pour son dernier voyage", comme me l'explique poétiquement ma soeur Catherine. Et je sais qu'Europ Assistance m'offre l'aller-retour pour assister à l'enterrement. Je serai à Paris dans deux jours. Xavier n'est pas là. Paris. Granny. Ma famille adorée. Mes amis. Quinze mois d'absence. Granny. mon neveu né pendant le voyage. Je souris. Granny peut comprendre. Europ Assistance. J'envoie un premier mail et rentre à l'hôtel, avec 1/2 h de retard pour Ludovic. "Désolée, ma grand-mère vient de mourir et je rentre à Paris." Impossible de m'empêcher de sourire, Ludovic doit me trouver amorale. Je lui brosse rapidement un portrait de l'inimitable Granny, il comprend mieux.

Granny, Shanghai, 1940

En moins de 2 jours, Europ Assistance m'organise la réservation du billet d'avion. Une certaine Marianella m'indique par mail où placer le vélo si Xav' n'arrive pas à temps à Bangkok, et une certaine Alexandra m'appelle pour tout confirmer à plusieurs reprises. Entre leurs condoléances visiblement sincères et leurs encouragements pour la suite du tour du monde, elles m'auraient presque remonté le moral, si j'avais été triste. Car ceux qui connaissaient la fameuse Granny le savent bien, on ne regrette pas beaucoup Tatie Danielle quand on fait partie de ses (très très très nombreux) souffre-douleurs.

Paris. Je suis donc tombée de haut, lorsque j'ai eu des vraies larmes à l'enterrement. Franchement, je n'aurais même pas pu l'imaginer. Et pourtant, après cette célébration, la première messe de ma vie que j'arrivais à écouter d'un bout à l'autre, après cette messe, donc, je sais que s'il y a un paradis, Granny y est depuis longtemps. Elle qui disait à son "ami" parkinsonien: "mais enfin, cessez de trembler, vous êtes ridicule". Ou encore, lorsque ma mère lui demandait ce qu'elle pouvait faire pour lui être agréable, ses fameux "et bien tais- toi". Elle avait la faculté d'installer des blancs durables, grâce à des petites phrases aimables du style : " Ah c'est vous le fils d'X ? Dieu que votre mère est devenue laide !" Et comment ne pas se souvenir de cette habitude charmante concernant ses poubelles ? Elle attendait que nous recevions des invités pour les balancer du 1er étage dans la cour, au beau milieu d'une conversation animée. Ah là là, ma grand-mère maternelle...

Elle était tout simplement à part. C'était sa nationalité.

Pendant qu Isa se recueille en France, Xav se recueille sur la mise à jour du site Et moi, sa petite fille "bien trop bête pour devenir journaliste", je repense à elle avec un sourire inévitable. Je repense à cette femme qui, afin de préserver son identité, n'a jamais voulu rompre la glace. Je repense à Mummy Tokyo, ma grand-mère anglo-japonaise, que j'ai découverte lorsque j'avais 11 ans. Yuri Horiguchi surnommée "L'Horrible Guchi" dans sa maison de retraite. Je repense à cette terreur aux cheveux blancs, j'y repense avec une immense tendresse et je suis vraiment heureuse qu'elle soit partie dans l'amour, l'amour infatigable de sa fille, ma mère, qui lui avait dit "cette fois-ci, je ne vous quitte plus, je resterai jusqu'à votre départ."

Granny, le psaume que vous avez choisi pour expliquer votre caractère, vous dans votre cercueil et nous dans nos souvenirs, ce psaume est le premier qui ne me fasse pas bailler. "Des profondeurs, je viens vers toi, Seigneur, et si tu ne le fais pas, qui pourra me pardonner" (ou un truc comme ca). Ce psaume est lumineux et il est inutile de vous dire que non seulement nous vous avons tous pardonné, et tout pardonné, mais surtout, nous sommes hyper fiers d'avoir eu une grand-mère aussi méchamment extraordinaire.

Et je suis ravie d'avoir un peu de vos cendres avec moi. Je les disperserai dans votre Asie natale à chaque fois que je serai dans un bel endroit.

Il nous aura fallu du temps mais je vous aime maintenant comme une vraie grand-mère, Granny.

Voilà.

Maintenant que ma mère pleure à chaudes larmes en face de son écran, je ne vais pas m'éterniser sur le bien que m'ont fait ces 4 jours à Paris, ce serait un hors sujet de 10 000 mots.

Mais quand même.

On m'a emmenée dans des traquenards où on m'a forcée à boire du vin et à manger du fromage. J'ai retrouvé mes amis et Paris dans des circonstances variées et belles. J'ai marché de la Tour Eiffel (scintillante) à Bastille, un Paris by-night inoubliable avec Roro. J'ai passé des heures dans un bain à tester tous les produits de beauté d'Hélène et Gilles avant de choisir entre 70 hauts et 17 bas pour m'habiller. Je me suis retrouvée sur la moto la plus rapide du monde, la ZXR 1200 débridée, 180 chevaux, interdite de vente en France, merci David Dumain. J'ai fait ma pétasse avec mon téléphone portable et mon emploi du temps hyper bisi. J'ai vu en vidéo les épisodes des aventures de Xaviéric et Isabil remarquablement mis en forme par Pierre de Bonne Pioche et bientôt diffusés sur Mezzo (vers Noël). J'ai appris par les Pioches qu'un boulot de rêve m'attendrait peut-être au retour. J'ai vu toutes mes planches contact chez Sygma devenu Corbis (berk) et ça m'a rassurée, parce qu'il y aura de quoi faire un bouquin et des expos. J'ai vu les images de Yann Arthus Bertrand à 3 heures du matin au Lucos, sublime clôture d'une soirée magique. J'ai reçu sans cesse des preuves d'amour qu'on me demande de transmettre à Xavier, avec qui ca se passe tellement mieux.

Ce sont aussi les memes darbooka qu en Afrique, l'extremite en forme d'ogive en moins... je sais, ca n a pas de rapport avec le texte, mais le darbooka, c est notre compagnon de route depuis la tunisie. Voila. Point final. Et puis, ca illustre le concert de ci-dessous. Bref, je suis remontée dans l'avion les larmes aux yeux, ce qui n'a pas suffi pour me faire surclasser. Mais c'est vrai qu'il était plein, même en première et en business (j'ai vérifié).

Cela dit, il faut l'avouer, si j'étais heureuse de rentrer à Paris, c'est parce que je savais que ça ne durerait que quelques jours, encore moins qu'une pause dans les capitales qu'on traverse depuis 15 mois. Ce voyage se finira à Paris mais nous y arriverons à deux, à vélo. Et maintenant que je suis en classe éco, mais au début de l'allée, là où on peut étendre ses jambes, maintenant qu'effectivement, il est absolument impensable d'espérer être surclassée, je sèche mes larmes et j'essaye de dormir, mais quand même, il faut que je ramène des bouteilles de vin et des mini baguettes à Xav donc il faut que je tienne jusqu'au dîner.

Bangkok Airport.

On retrouve vite ses réflexes lorsqu'on est d'origine auvergnate. Parce que me faire payer 100 Baths un minibus qui en valait 70 cinq jours plus tôt, c'est intolérable. 30 baths, ça fait presque deux repas ici, et pourtant, c'est le 1/3 du prix de mon dernier café, avalé en bonne compagnie au Drugstore des Champs-Elysées, il n'y a pas 16 heures. Mais ça, c'est déjà loin. Un bath est un bath. ça coûtait 70 en début de semaine. Bon, Isabelle, calme toi sinon c'est Xav' qui va en faire les frais, alors que tu as précisément des tas de cadeaux pour lui. D'ailleurs, je pue le fromage à plein nez, bien que le reblochon, les clacos', le conté, le brie et le chèvre soient soigneusement enfermés avec le chocolat, les compotes de pommes, le Ricoré, les crèmes à raser, les 18 brosses à dent et les 8 petits pains que j'ai réussi à piquer dans l'avion.

Bangkok, the retour.

Hooooooo ! Xav, au premier varant qui montre son nez, il prend la poudre d'escampette Je pensais recevoir cette claque merveilleusement moite des climats tropicaux, à la sortie de l'avion. Premier signe du dépaysement. Mais en fait, non. Depuis longtemps, depuis des mois, la lenteur a gommé l'exotisme. Ces 4 jours à Paris étaient un peu comme un rêve éveillé : ma présence est ici, à Bangkok. Je retrouve notre hôtel de la "rue des hôtels pas chers" et c'est ici que je me sens (provisoirement) chez moi. Parce que ce voyage, c'est ma vie présente, ce n'est pas un passe-temps passager. Et pour Xav, c'est pareil. Certain de nos proches s'inquiètent pour nos retours respectifs dans la vie active. Ils croient que nous continuons indéfiniment pour fuir ce retour. Pour nous voiler la face. Non. Nous continuons parce que c'est ce que nous pouvons faire de mieux. Rien n'est plus enrichissant, même si notre banquier commence à tousser. Ce voyage nous comble tous les deux. Et plus ça va, mieux c'est. Depuis la fin de la Chine, nous avons enfin appris à nous respecter et à oublier nos exaspérations, nous qui étions partis pour un Paris-Pékin...

Mais c'est promis, nous ne rallongerons pas la liste. Thaïlande, Malaisie, Singapour, Brésil, Portugal, Espagne, FRANCE. Ça va arriver à toute allure.

He, Xavier, je ne veux pas te faire flipper, mais il y a un cobra sur ta sacoche ! Enfin, à toute allure... pour l'instant, ça dépend de Sony. Ces incompétents nous font poireauter de S.A.V. en S.A.V. et même Sony France ne respecte pas ses engagements. Du coup, on est bloqués à Bangkok. Nous pouvons d'ailleurs écrire un petit guide pratique sur les Services Après Vente Sony asiatiques, tous aussi médiocres, mais avec une mention spéciale pour Sony Bangkok, où la gentillesse du personnel et la qualité du café nous ont un peu adoucis. En plus, au pied de l'immeuble, ils ont un grand bassin avec de magnifiques poissons d'eau douce. Très utile pour calmer les Français furieux.

Le xylophone, on le retrouve partout en Asie du Sud-EstQuinze jours d'attente. Le temps de changer d'hôtel, pour cause d'incompatibilité d'humeur avec le personnel. Il faut avouer qu'après le Cambodge, nous supportions mal d'affronter chaque matin la mine hostile du cerbère. Xav' a déniché une Guest House où l'on se sent vraiment chez soi, j'ai repéré la marchande de riz frit la plus souriante de la ville et nous avons jeté notre dévolu sur un oueb bar humain. Bref, à Bangkok, nous avons nos petites habitudes.

Gros plan sur le joueur de Pee-Nai: morceau à télécharger sans hesiter Départ de nuit, en bus, pour Songkhla, Sud Thaïlande. Un vague contact auprès de l'université se transforme en mine d'or. Sur place, le responsable de la section musique s'enthousiasme pour le projet et se démène pour nous offrir le meilleur. Le meilleur, c'est notamment cette extraordinaire interprétation de pee-nai (Fichier=thailand-pinai-singprajim.mp3; Taille=1.5 Mo), une flûte envoûtante et diabolique. A chaque fois que nous l'écoutons, nous poussons un soupir de plaisir.


Et hop ! Un concert prive organise pour nous, comme ca, en 5 minutes Comme si cela ne suffisait pas, ils se sont démenés pour nous laisser assister à une répétition que nous avons pu enregistrer (Fichier=Thailand-Sao-Ou-Granatee.mp3; Taille= 823 ko; deux instruments à corde et un xylophone, et une petite flûte discrètement planquée derrière) et une poursuite endiablée entre une bonne dizaine d'instruments à cordes. C'était un cours: il fallait le deviner: nous nous sommes laisser happer par l'action...(Fichier=Thailand-HomRong.mp3 ; Taille= 1.2 Mo).
Quelle belle idée, ce thème de la musique... Dès qu'on pense à notre futur livre - C.D - cédérom, on se dit "y'a d'quoi faire"... La bonne humeur est partie pour rester.

Souriez, vous êtes cernés !

Trois semaines que nous sommes là, et impossible de se souvenir du mot "bonjour", en thaï. Mais nous savons le dire : un sourire fait l'affaire. Ici, les gens sourient aussi naturellement qu'ils respirent. A Hat Yai, la mousson a transformé la ville en rivière.Ca marche: pour que les tigres n'aillent pas chez lui, M. George-George badigeonne ses plantes avec son urine Pourtant, les gens semblent se marrer. Leur maison déborde, ils sourient. Sur les routes inondées, nous oublions nos pieds pleins de crevasses. Parce qu'autour de nous, tout le monde sourit. Ce pêcheur, dans le fossé, avec de l'eau jusqu'au cou. Cette femme, sur le pas de sa porte, avec de l'eau jusqu'aux genoux. Ces gamins, ces vieillards, ces cyclistes, ces flics... une épidémie. Franchement, ça change la vie.

Un homme peche, pour nourrir sa famille avec de petits poissons de 4 cmTrois derniers jours à pédaler sous la pluie. Trois derniers jours pour apprendre à apprécier ce pays, que les Thaïs surmenés de Bangkok nous avaient appris à déprécier.

Les femmes se voilent, l'Islam s'étire, nous approchons de la Malaisie. Premier pays musulman depuis le Pakistan, en mai dernier. On n'a pas fait exprès mais on arrive juste pour le ramadan. La mousson ET le ramadan. Beau programme.

C'est en bateau que nous partons à la conquête de la Malaisie.

On va etre francs: patauger tous les jours, on finit par s'en lasser...Et c'est Xav' qui vous racontera la suite, parce que moi je file au Brésil, là maintenant tout de suite, pour des raisons très très très personnelles.

Comme je ne vous retrouverai pas avant mi-janvier, je vous souhaite d'excellentes fêtes de fin d'année, pleines de soleil, de projets, de beauté et surtout, de soif de vivre.

C'est bientôt Noël et le père Xavier s'occupe de vous: carnet de jungle de Malaisie.

kilométrage dans le pays, à vélo: 605 --- kilométrage dans le pays en car / pick-up / avion : 1100 --- Total du kilométrage à vélo: 14800 --- Total du kilométrage en car / pick-up / avion : 20640


Quelques mots de Xav':

Eh oui, en thailande aussi, il pleut tout le temps On a tâché d'augmenter la qualité des photos. Vous avez remarqué ? Cela a t-il beaucoup ralenti le temps de téléchargement de la page; c'en est-il devenu insupportable...Non ? Oui ? Allez faire un tour sur nos Coups de Coeur: quel que soit le sujet que vous choisirez, il vous déridera.
Mon carnet de bord Thaïlande viendra après Noël. Soyez zattentifs, mais une petite carte de Thaïlande est dores et déjà disponible (carte-thailand.tif, 32 ko)

Poipet - Bangkok : 305 km --- Bangkok - Songkhla : 1100 km de bus --- Songkhla (musiciens charmants et excellents) - Pattani - Narrathiwat - frontière malaise : 300 km vélo, très beaux paysages et Thaïs souriants (vive la vie !)

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